Parfois, les recherches viennent de questions bien étonnantes. Il y a de cela quelques semaines, un élu m'a demandé « savez-vous pourquoi certains coqs d'église ont des attributs? ». Je l'ai regardé, un peu étonnée, me demandant s'il voulait bien dire ce à quoi que je pensais. Eh bien oui, il voulait savoir pourquoi certains coqs en haut des clochers avaient des « attributs » et d'autres non.
Un défi était lancé. J'ai commencé à prendre en photographie les coqs des églises que j'étais amenée à visiter et ce, au téléobjectif parce que très sincèrement, il est difficile de distinguer les « détails » de ces animaux quand ils sont à plusieurs dizaines de mètres du sol. Et oui, certains coqs n'ont que des barbillons (partie rouge située sous le bec). Il en résulte que ce sont en fait des chapons.
Mais l'intérêt de cette étude ne s'arrêtait pas là. En effet, il faut savoir que le coq n'a pas été placé en haut des églises en tant que symbole du peuple gaulois, mais en référence à un texte de Saint Grégoire, Les Moralia, qui distinguait trois animaux capables de repousser les rois et leurs armées : le lion, le coq aux reins ceints et le bélier. Et de faire du coq castré l'animal auquel il est possible de rattacher les premiers clercs qui devaient être au-dessus de toutes pulsions charnelles pour guider les fidèles. Le coq est également l'animal qui, en annonçant le lever du jour, a permis aux premiers fidèles de connaître l'heure de la première prière et c'est également à lier à la puissance du renouveau quotidien. C'est donc celui qui rassemble les fidèles.
Cela a donné lieu à de nombreuses pratiques populaires, encore en vigueur actuellement, où on enjambe le coq avant qu'il soit béni par le curé et hissé en haut du clocher. Il était même amené aux malades ou aux personnes âgées pour qu'elles puissent également l'enjamber. Il était aussi conseillé aux jeunes garçons de l'enjamber également afin qu'ils puissent dire à leurs fils : « tu vois, moi ce coq je l'ai enjambé ». Ils étaient également gravés sur les murs des églises par pose directe du coq ou bien peint à l'intérieur sur les voûtes, comme dans l'église de Courdemanche.
Par la suite, le terme « gallus » qui voulait dire à la fois « coq » et « gaulois » a commencé à être utiliser par les ennemis du royaume de France pour désigner un peuple couard et lâche, en fait sans « attributs » virils. Cette assimilation entre les deux significations possibles du terme latin vient de l'extérieur du royaume. Les Anglais ou les Italiens se sont servis du texte de La Guerre des Gaules de Jules César qui faisait des Gaulois les premiers habitants du royaume. La royauté s'est trouvée alors dans la quasi obligation de réhabiliter le coq doté de ses attributs comme symbole de la vigueur, du courage et de la surveillance pour le peuple français.
Mais le coq avec attributs n'en devient pas pour autant un symbole utilisé en héraldique et l'aristocratie ne le reprend pas à son compte. Il est ainsi très rare de voir un coq sur des armoiries et si vous en trouvez, il faut alors regarder s'il dispose de sa crête ou non, signe de puissance. C'est donc au moment de la Révolution Française que les représentants du peuple choississent alors l'animal comme preuve de la fierté nationale.
Ainsi le coq sans attributs est plutôt un symbole religieux alors que celui avec attributs est un symbole républicain. À méditer pour tous ceux et toutes celles qui auront à choisir le prochain coq de leur église.